Définition et qualification du Médiateur

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Définition et qualification du médiateur

La directive européenne du 23 mai 2008 relative à certains aspects de la médiation civile et commerciale, définit la médiateur comme étant un tiers menant une médiation avec efficacité, impartialité et compétence respectueux de la qualité de la fourniture de sa prestation bénéficiant d’une formation initiale et continue garant de son efficacité, sa compétence et de son impartialité à l’égard des parties (articles 3 et 4).

La définition retenue par le Conseil d’État

Dans son rapport du 29 juillet 2010 « développer la médiation dans le cadre de l’Union européenne », le Conseil d’État propose de retenir la rédaction suivante dans le cadre de la transposition de la directive : « Le médiateur est un tiers, impartial, indépendant, compétent, probe qui est sollicité par les parties d’un commun accord, en vue de mener avec toute la diligence requise, le processus de médiation dont il est chargé par les parties à un différend. Le recours à un médiateur peut également être ordonné par le juge avec l’accord des parties, dans le cadre du règlement qui lui est soumis ».

Sans entrer dans un débat académique, qui pour autant ne serait pas vain, il est souhaitable et conforme de donner une définition commune et partagée du médiateur, que sa prestation porte sur un litige judiciarisé ou sur un litige non judiciarisé. Dans les deux cas, la médiation conduite repose sur la « convention » des parties d’y recourir. Cette clarification est essentielle et respectueuse du droit européen. En effet, qu’elle soit volontaire, suggérée, proposée ou ordonnée, la médiation ne peut-être mise en œuvre qu’avec « l’accord » des parties de trouver elles-mêmes avec l’aide d’un tiers (dénommé médiateur) un règlement au litige les opposant. Ceci vaut en matière civile et commerciale pour les médiations judiciaires (cf. Michel Augras-La médiation judiciaire prud’homale- Médiatoroscope) comme pour les médiations dites conventionnelles que la directive qualifie d’extrajudiciaire, qu’en droit français en référence au Code civil, nous qualifions de « conventionnelles ».

La proposition du Conseil d’État d’adopter des définitions communes de la médiation et du médiateur est de nature à clore le débat sémantique portant sur la médiation conventionnelle ; dès lors il serait regrettable que puissent coexister deux régimes de médiation distincts selon la nature des litiges ou différends en cause ( cf. Premier Ministre 28/05/10). Il est tout aussi cohérent que la médiation puisse également se « développer » auprès des juridictions administratives pour des litiges ne portant pas sur des affaires régaliennes. Le même souci de cohérence, devrait naturellement conduire à donner une même et unique définition du médiateur que la matière soit administrative, civile ou commerciale. En l’espèce, le Conseil d’État observe que la dénomination de « médiation » recouvre de façon inappropriée une grande diversité de processus qui doivent être regardés comme des recours préalables obligatoires ou entrant dans la classification de plaintes de consommateurs ou de réclamations d’usagers.

Quelque soit le contexte préparatoire à la transposition de la Directive, il n’est pas souhaitable de laisser planer une ambiguïté sur ce qui relève du « processus de médiation » énoncé par le droit communautaire et la qualité du médiateur accompagnant ce processus.

Neutralité du médiateur

« Le médiateur est un tiers, impartial, indépendant,compétent, probe ». Cette définition proposée par le Conseil d’État, fait écho aux travaux du Livre Vert de la Commission auxquels la France a activement participé en présentant des expérimentations conduites avant et après 1995 sur les modes alternatifs de résolution des conflits. Une question de fond subsiste quand à la « neutralité » du médiateur. La conduite d’une médiation requiert de la part du médiateur qu’il adopte une posture de neutralité à l’égard des parties en litige. Il ne peut, sauf à remettre en cause le fondement même du processus de médiation, être « jugeant » de leurs comportements, intentions ou de leurs actes. Il ne saurait pas d’avantage porter un jugement sur l’accord auquel elles parviennent avec son aide. L’indépendance , se mesure à l’égard des parties. Elle se distingue de la neutralité qui caractérise la relation avec les parties, elle-même distincte de la compétence. De même, l’impartialité repose sur des notions d’équité par opposition à des considérations partisanes. Le médiateur ne saurait être seulement équitable. Sa prestation ne peut pas être contenue dans une justice naturelle fondée sur la seule reconnaissance des droits de chacun. Il doit également être « neutre ».

La France ne saurait se limiter et s’enfermer dans la terminologie à minima de la directive pour donner une définition du médiateur qui soit conforme à l’esprit des travaux communautaires préparatoires et à l’éthique les sous-tendant. Elle se doit de tirer les enseignements de sa propre histoire, afin de lever définitivement toute ambiguïté subsistant entre la conciliation et la médiation, en retenant la qualification de neutralité :

« le médiateur est un tiers, impartial, indépendant, neutre, compétent, probe… »

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[…] La directive européenne définit le « médiateur » comme étant un tiers menant une médiation avec efficacité, impartialité et compétence respectueux de la qualité de la fourniture de sa prestation bénéficiant d’une formation initiale et continue garant de son efficacité, sa compétence et son impartialité à l’égard des parties (cf. Définition et qualification du Médiateur). […]

Jean-Louis Lascoux
13 années plus tôt

« La précipitation est mauvaise conseillère. » avec ce lieu commun, j’estimerais avoir suffisamment commenté le rapport du conseil d’Etat qui est baclé, mal ficelé, mal documenté et incohérent. Il ne cite même pas les textes en cours d’adoption sur la thématique qui intéresse le fond de son sujet. Navrant. Alors, bien sûr, on se voit obligé d’aller plus loin, alors que ce genre de boulot ne devrait même pas donner lieu à une note de bas de page. On se voir obligé de le prendre en considération parce que la médiation risque de se trouver définie par l’incompétence de certains, la… Read more »

ICARD
ICARD
13 années plus tôt

Michel Augras introduit à juste titre une distinction fondamentale entre médiateurs et organismes fournissant des services de médiation. La directive européenne à laquelle il se réfère, est sur ce sujet sans ambiguïté, dans la mesure où elle définit avec précision « la médiation », « le médiateur », « la qualité de la médiation » et « la formation initiale et continue des médiateurs ». Bien évidemment, rien ne s’oppose à ce que les médiateurs se regroupent dans des organisations auxquelles le droit européen reconnaît d’ailleurs une mission d’information du public pour l’accès à la médiation. Cette mission, ne leur confère pas pour autant et de facto la… Read more »